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Le Portfolio de Michel Mée

Au fil du Mékong et de la Nam Hou

 

Le royaume du million de rizières, c’est l’ancien royaume Lan Na du nord de la Thaïlande que traverse à l’Est le Mékong qui sert maintenant de frontière entre la Thaïlande et le Laos. Dans les montagnes environnantes le long des frontières birmanes et Laos, vivent de nombreux peuples et tribus, dont les Lahu, Hmong, Padong (femmes au long cou), Akha, Miao-Yao, Lao, etc.
À Nam Tok Pumuen, cascade cachée et normalement déserte, nous croisons une famille Lahu qui finit son offrande aux esprits de la forêt puis cuit son repas aux creux de tiges de bambous vertes tandis que la matriarche prépare des brochettes.
Dans les collines au nord de Ban Mae Khao Tom Tha Sut, se trouve un village de réfugiés birmans, femmes Padong au long cou et Akha qui traditionnellement pratiquent la culture sur brûlis et produisent de l’opium.

Chiang Khong est la porte d’entée du Laos, de l’autre coté du Mékong, Huay Xai, passeports, tampons, change et slow boat pour Pak Beng et Louang Prabang. Notre slow boat est un omnibus avec sièges en bois massifs, donc, arrêts et mal au cul partout… je m’installe à l’arrière accoté au balcon à balustre avec les indigènes (Hmong) qui cuisine un curry sur un réchaud à pétrole en mangeant par poignés du riz gluant. À l’avant, loin de nous, quelques touristes échangent leurs impressions comme ils échangent des devises, question d’habitude…

Le fleuve des neuf dragons, après le tumulte de l’Himalaya, se prélasse paisiblement, juste quelques remous à l’approche des écueils qui jonchent son lit rappellent sa puissance et puis de temps en temps un rapide vient nous divertir. Le fleuve, c’est une coulée brune dans l’enfer vert, dans la jungle luxuriante. Ici, il n’y a pas d’autres voies de communication que le slow boat qui va de village en village, les enfants se ruent sur les plages de sable fin dans l’attente de notre accostage et nous proposent poissons, écureuils ou bananes tandis que les marchandises et visiteurs sont débarqués… À peine le bateau parti ils s’égaillent dans la forêt. En avales, des buffles d’eau, puis des vaches paissent les berges tandis qu’un orpailleur remue sa batée. Tout est calme, Un jeune Hmong embouche son queej (orgue à bouche) instrument qui permet de guider l’âme des défunts vers la réincarnation, l’après-midi s’écoule au rythme lent de cette musique mélodico-sacré entre somnolence et contemplation.

Au crépuscule, arrivé à Pak Bang, village de lodges… un repas quelconque avalé en vitesse, couché à tâtons, à Pak Bang, on coupe l’électricité à 22 h.

Au réveil, la vallée est emplie de brumes qui s’effilochent et se dissipent peu à peu sous l’action du soleil tandis que la chaleur devient pesante, le fleuve et notre bateau poursuivent leur route, les montagnes, collines,falaises qui nous dominent semble de plus en plus chaotique, en contrebas, parfois, on distingue dans une clairière un village sur pilotis, quelques jardins, un éléphant qui tire vers la berge un tronc colossal qu’un grumier attend, puis quelques champs de maïs, des rizières, une pagode au sommet d’une colline avec son escalier comme trait d’union entre le ciel et le fleuve et la jungle partout qui escalade les montagnes presque verticales comme pour défier le vide.
Pour ce voyage, mes compagnons sont un couple d’émigrés chinois en villégiature, ils sont gais et parle un anglais inoubliable, je crois qu’on arrive à se comprendre.
Au coucher du soleil on débarque à Louang Prabang, marché de nuit, temples partout, touristes aussi.

 

Remonter la rivière Nam Hou depuis Louang Prabang jusqu’à Muang Ngoy n’est pas si différent du voyage sur le Mékong, d'ailleurs sur vingt-cinq kilomètres on remonte celui-ci. Face aux grottes de Pak Ou, à main droite, on s’enfonce au gré de la Nam hou qui a creusé son lit aux pieds d’impressionnantes et spectaculaires formations karstiques. Notre slow boat est de taille réduite, et peux contenir une vingtaine de personnes, assises à même une planche qui court vingt centimètres sous un plat-bord à la bonne hauteur pour vous casser le dos, chacun s’efforce de ne pas mettre les pieds dans l’eau graisseuse qui croupie au fond de ce qui n’est en fait qu’une barcasse avec toit, vaguement aménagé pour accueillir le quidam, et dont le faible tirant d’eau permet de remonter les nombreux rapides de la rivière, moteur hurlant à fond. Le slow boat, c’est le bus du Laos, il en circule sans arrêt, on se hèle au passage, parfois l’on s’accoste, pour un tailler une brève bavette. Ainsi donc sur une plage de sable fin, non loin de Hat Phang nous sommes hélés par un groupe de touriste, des chercheurs me dit-on, dont le canot est tombé en rade, on se serre un peu plus les jeunes s’installent sur le toit, le voyage reprend, dans la chaleur et l’inconfort. On croise de tout, depuis le cochon noir qui patauge dans la vase au Martin pêcheur… Aux environs de Then Ken, dans les rapides nous croisons un train de bambou qui peine à la manœuvre, dans un des méandres suivants, un radeau ancré au milieu du courant produit grâce à une roue à aubes et un alternateur de poids lourd du courant pour le village voisin.
Nous arrivons enfin à Nong Khiaw pour la nuit, douche glacée, chambre humide…

Réveil tardif, retour à l’embarcadère, les bateaux du matin sont déjà loin, un seul est encore la et partira plus tard pour Muang Ngoy, j’attends donc… puis la croisière reprend, de rapide en plan d’eau, je laisse ma main pendre à l’extérieur, effleurer l’eau, nostalgique, je fredonne :
« La vie s'écoule, la vie s'enfuit
Les jours défilent au pas de l'ennui… »
Sur les berges, des femmes, des fillettes font la lessive tandis que les garçons jouent en nageant, çà et là, un hameau, une habitation isolée, quelques rizières et jardins.
Muang Ngoy, terminus.

Au matin, les enfants s’en vont vers l’école, en main, ils ont une poignée de riz gluant accompagnée de piments qu’ils dégustent lentement, leur petit déjeuner.
Plus tard j’irai me balader dans les villages alentours, Ban Na, Ban Houay Bor, puis dans les jungles au-delà, entrainé par des chasseurs au fusil bricolé.
La chasse ici est interdite, mais permet d’agrémenter le riz quotidien, c’est aussi un apport non négligeable en protéines pour les populations pauvres du nord Laos.

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